Sommet de la Francophonie: et le Français dans tout ça ?
http://afp.google.com/article/ALeqM5h2U ... bFvs_sikaQ
QUEBEC (AFP) - Des voix se sont élevées au XIIe sommet de la
Francophonie à Québec en faveur d'un recentrage de l'organisation sur
la défense du français et de la diversité culturelle, craignant une
"dérive" vers une organisation politique réduite à "une Onu bis sans
moyen".
Les chefs d'Etat et de gouvernements ont débattu dimanche, au cours
d'un sommet dominé par la crise financière, de la langue française,
pour la première fois thème à part entière d'un sommet de la
Francophonie, aux côtés de la gouvernance économique, de l'Etat de
droit et de l'environnement.
Toutefois, certains participants s'interrogeaient sur le tournant
politique pris depuis quelques années par l'Organisation
internationale de la Francophonie, au risque de devenir, selon les
termes d'un expert du sujet Dominique Wolton, "une ONU bis sans
moyen".
"On se demande parfois quelle est la pertinence de ce forum pour
débattre d'un certain nombre de sujets", a déclaré à l'AFP pendant le
sommet le secrétaire d'Etat belge aux Affaires étrangères Olivier
Chastel, résumant un avis partagé par d'autres délégués.
"Que la Francophonie s'occupe clairement du développement du français,
des grands thèmes généraux comme la liberté de droits, OK.
Mais pour les points de politique étrangère, les conflits se règlent à l'Onu",
a-t-il estimé.
Du coup, la déclaration finale de Québec est, selon lui, un texte
"fourre-tout" qui comprend beaucoup de "déclarations de principes" sur
les grands thèmes abordés mais qui ne peut s'engager au-delà de ce qui
est décidé dans les instances internationales "adéquates".
"A quoi sert à l'avenir un organisme mondial de la Francophonie si la
défense de la langue commune est au dernier rang de ses
préoccupations? s'interrogeait pour sa part le quotidien québécois Le
Devoir.
Pour Dominique Wolton, la Francophonie doit se recentrer sur "ce
qu'elle sait faire: défendre le français c'est défendre toutes les
autres langues et le pluralisme linguistique" dans un monde dominé par
l'anglais.
"Si la Francophonie continue à ressembler à une ONU bis, elle y
gagnera peut-être en tapis rouges mais elle y perdra son âme. A faire
des grandes déclarations sur tout, elle y perd sa crédibilité", a-t-il
affirmé à l'AFP.
Il critique également "l'absence de vision stratégique de la France en
matière de Francophonie" alors qu'elle finance à 80% ses institutions.
Il milite pour une "Académie de la Francophonie" qui intègre le
"français des banlieues, de l'Outre-mer, des francophones" et pour une
"Francophonie des affaires".
Le Bénin a proposé au sommet la création d'un "visa francophonie"
facilitant la circulation des personnes, une idée défendue dans un
rapport publié en juin qui critiquait une France "repliée sur
elle-même".
Le secrétaire général de la Francophonie Abdou Diouf a lui estimé que
la défense du français et de la diversité allait de pair avec "des
choix politiques forts" visant à "l'émergence d'un multilatéralisme
plus équilibré, plus solidaire".
Dans la déclaration finale, les membres de la Francophonie s'engagent
à "garantir sa pleine reconnaissance sur la scène internationale"
notamment par l'application d'un vademecum sur l'utilisation du
français dans les instances mondiales.
Ils défendent "un pacte linguistique" entre l'OIF et les Etats et
gouvernements qui le souhaitent pour favoriser l'utilisation du
français.
La Francophonie compte quelque 200 millions de francophones dans le
monde. Le français, en perte de vitesse, est la neuvième langue parlée
dans le monde derrière le chinois, l'anglais, l'indi, l'espagnol, le
russe, l'arabe, le bengali et le portugais.
La France a dépensé 410 millions d'euros en 2008 pour l'enseignement
du français dans le monde en 2008. Le British Council vient de lancer
un programme visant à faire passer le nombre de locuteurs anglophones
de 2 à 3 milliards avec un investissement de 150 millions d'euros.